18 septembre 2005

Une parenthèse nécessaire

Tout d’abord permettez-moi de vous recommander le lien suivant, qui vous emmènera sur le blog d’un première mission ACF, parti comme logisticien au Burundi depuis peu. Les bordelais d’entre vous reconnaîtront peut être Jan Schmidt Whithley promo 99. J’ai rencontré Jan en école de commerce, avec qui nous avons partagé beaucoup de musique, de rugby, et bien d’autres choses. Jan a effectué son CSNE en Turquie par la suite, s’est lancé dans un tour du monde, et a bourlingué ci et là avant d’atterrir chez ACF. Ses narratifs de voyage m’ont toujours fait décoller et je recommande à tout le monde son blog, avec ses récits passés et présents qui en valent largement le détour. Plaisir de nous voir dans la même famille à nouveau mon cher Jan, en espérant que nos chemins se croiseront au plus vite : http://jabla.over-blog.com Allez, reprise de contact après bientôt deux mois de silence. Qu’avez-vous loupé? La fin de mon calvaire avec l’arrivée de la nouvelle responsable de notre base support que j’essayais tant bien que mal de faire tourner en plus de la mienne et en l’absence d’expats depuis 6 semaines. Le responsable de cette dernière était parti fin juin en deux temps trois mouvements sans passation véritable, me laissant la joie de pallier à cette tâche. J’ai eu le soulagement début août donc d’accueillir sa remplaçante avec la quelle nous avons passé 10 jours en passation et formation en tous genres. Le 11 août je regagnais enfin mon bush chéri histoire de me replonger comme il fallait dans notre programme et retrouver tout ce pour quoi j’avais décidé de prolonger mon séjour au Congo. Etant rentré de mon dernier break le 15 mai j’avais droit à une semaine de vacances à partir du 15 Août…que j’ai finalement pris le 03 septembre contraintes de boulot obligent. Il faut reconnaître que ces trois derniers mois ont été tout aussi intenses que les 6 premiers réunis, et que ma santé physique et mentale commençait à en pâtir…si nous pouvons tous imaginer l’impact physique de bosser 7 jours sur 7 10 heures par jour pendant 3 mois environ, gardons une pensée pour Freddy Mercurie « I’m going slightly mad! » Il est devenu fou le Mario? Ben vous me direz quand vous me reverrez mais il est clair qu’être aussi isolé de ses racines, sa culture, et son environnement, tout en étant exposé à notre réalité humanitaire et à l’attentisme souvent absurde et parfois déprimant dont je parlais dans un de mes premiers récits postés sur ce blog...Quand vous expliquez à l’électricien qu’il vaut mieux débrancher le chargeur avant de l’ouvrir, que c’est bien la 10è remarque du genre, et qu’il vous répond ne vous inquiétez pas méssié Mario je suis très souple, croyez moi la boule elle commence à se perdre…c’est çà aussi sauver des vies! allez j’en vois rigoler et croyez moi on en rigole aussi sinon c’est pendaison directe, mais bon tout çà pour dire : il me fallait vraiment des vacances. Allez, tu es en Afrique, toutes ces destinations inconnues, excitantes à un coup d’avion! Les réserves du Swaziland, les plages de Zanzibar, les bars de Mozambique…que nenni les amis, même si j’y ai pensé, il me fallait revenir en territoire familier, européen, apaisant. Stop la nouveauté, il fallait reposer mon corps certes mais surtout mon cerveau : direction mon dernier lieu d’habitation connu avant le Congo, j’ai nommé Londres, pour une semaine!!! Petite pause là, et message aux londoniens qui lisent ce blog. Désolé de ne pas avoir fait signe, mais je me devais de rétablir la barre, souffler, et prendre du temps pour moi. Des vacances retrouvailles n’auraient pas fait avancer le schmilblick et quand je vois le résultat à présent je me dis que j’ai eu raison. Donc pas de soucis on se rattrape à la fin de l’année c’est promis. Bon comment çà s’est passé? Pas de mots pour décrire ce que j’ai ressenti pour être tout à fait franc avec vous. Cà a commencé à l’aéro de Bruxelles le dimanche matin ou j’ai bel et bien eu peur pendant une bonne vingtaine de minutes. Si je m’attendais à un choc, je ne m’attendais pas à avoir des frissons et vouloir me réfugier n’importe où loin de tous ces gens, ces bâtiments propres et ordonnés, et ce flot humain que j’avais bel et bien oublié! Ca a continué à Londres, je ne vous raconte pas le sprint entre le métro et mon ancienne maison. Les premières bouteilles de rosé dans notre jardin de Tournay Road (ceux qui connaissent comprendront) ont bien aidé mais ce n’est que le mercredi soir que tout est rentré dans l’ordre. Encore un pallier franchi dans le monde de l’humanitaire : gérer le retour à la normale. Rien de tout cela n’était anormal aux dires des anciens et des plus expérimentés, je m’en tire même mieux que d’autres apparemment, mais je suis soulagé car j’avais quelques craintes. Qu’allais je ressentir en revenant sur mes pas? De la colère face à l’indifférence générale et l’individualisme environnant? De la nostalgie d’une vie derrière moi mais tellement agréable. Une vie que je n’ai jamais quitté par dépit mais bien par choix. Me rappellerait elle, au point de remettre en cause le tournant que j’ai pris voilà bientôt 11 mois de cela? L’Afrique resterait elle présente aussi dans ma tête m’empêchant de faire la coupure dont j’avais tant besoin? Enfin qu’allais je ressentir face aux quelques personnes que j’aie revues? Allais je retrouver des amis, des inconnus, ou bien pire des gens avec qui je n’avais plus rien à voir? Eh bien rien de tout cela pour mon plus grand bonheur. Ce break était donc nécessaire, non seulement à titre de repos mais aussi à titre identitaire car s’il a confirmé que rien n’avait changé au niveau des convictions, de mon appartenance culturelle, il a aussi renforcé ce sentiment d’être tout simplement en mission en Afrique, aussi agréable qu’elle soit. Je me suis posé la question pendant longtemps de savoir à quel point j’avais assimilé la vie à l’africaine autant dans le quotidien que sur certaines considérations plus abstraites. La réponse est là : suffisamment pour prendre mon pied dans le travail et m’intégrer dans mon lieu de vie, et suffisamment pour me rendre compte que cette réalité ne serait la mienne que temporairement, me laissant en harmonie avec mes racines, ma famille et mes amis. Réaliser que l’assise qui m’a permis d’en arriver là était toujours aussi solide était la plus belle chose à récolter de cette semaine ma foi bien trop courte. Je me sens encore mieux que quand j’ai décidé de prolonger ma mission. Pourquoi? Car j’ai pris le recul nécessaire pour bien négocier les derniers mois qui me restent. Car je sais que mes vacances après cette mission et avant la prochaine seront optimales en termes de récupération, et que je ne passerai pas de temps à me demander ce qui m’arrive. Je n’ose imaginer mon état si j’étais rentré en Europe qu’en Janvier après 15 mois de Congo… pris l’avion le cœur encore plus léger, et avec un enthousiasme de même intensité mais tellement différent des derniers retours sur cette mission. Cela fait donc une semaine que je suis rentré et je m’envole demain aux aurores pour la brousse pour ne pas en ressortir avant début novembre! Elle n’est pas belle la vie? Pour info, c’est à présent officiel, je quitterai la mission Congo le samedi 30 décembre au soir. Passage à Londres d’une semaine pour débriefer, me livrer aux check-up médicaux de rigueur, puis la Syrie pour un bon mois histoire de retrouver mes géniteurs et consorts après deux ans d’absence. S’ensuivra un mois de février off que je compte mettre à contribution pour revoir un maximum d’entre vous, et je repartirai en mission début Mars. Prochaine destination? Quelques pistes, beaucoup idées, mais c’est bien trop loin pour l’instant…. Allez je vous en dirai plus la prochaine fois, mi-novembre Inch Allah! En attendant, si vous avez des sous qui traînent…. Donnez à Action Contre La Faim!